La marque Manolo Blahnik peut (enfin) s’installer en Chine

Exploiter sa marque pour ne pas risquer la déchéance
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Après 22 ans de procédure judiciaire pour récupérer son nom, Manolo Blahnik, le créateur de chaussures de luxe basé au Royaume-Uni, va (enfin) pouvoir commercialiser ses produits en Chine.

L’affaire remonte à 1999, lorsqu’un homme d’affaire chinois a procédé au dépôt en Chine de la marque « Manolo & Blahnik » avant que le créateur de luxe ne le fasse.

Or, la législation chinoise applique en matière de marques le système du « premier déposant » (premier arrivé, premier servi). Ce système permet notamment à des « pirates » (des sociétés ou des particuliers) d’obtenir des droits d’exploitation sur une dénomination, sans réelle intention de les exercer.

Ces enregistrements « pirates » peuvent donc par la suite être revendus, généralement à des prix élevés, aux marques étrangères désireuses de s’étendre en Chine.

Ces fléaux sont relativement fréquents et s’accentue avec l’augmentation de la notoriété des entreprises.

→ A titre d’exemple, un déposant malveillant avait obtenu l’enregistrement du nom Tesla avant qu’Elon Musk ne pénètre sur le marché chinois. Ce déposant a ensuite tenté d’attaquer le constructeur automobile en justice pour défendre son droit. L’affaire a finalement été résolue à l’amiable.

→ Ou encore, la maison Hermès qui a perdu, en 2012, une bataille judiciaire qui a duré plus de 15 ans contre une entreprise textile chinoise qui avait déposé et exploitait une traduction très proche du nom Hermès en mandarin (« Ai Ma Shi »). Les autorités chinoises ont estimé que la maison de luxe française n’avait pas su démontrer que le fabricant de vêtement avait acquis la marque illégalement.

Ainsi, l’enregistrement de la marque « Manolo & Blahnik » empêchait le créateur d’utiliser son nom pour commercialiser ses chaussures dans un marché clé du luxe.

Ce dernier avait alors engagé une procédure dès 2000 à l’encontre de cette marque qui a tardé de nombreuses années, dans le but de prouver l’existence depuis les années 1970 de sa marque, et le non-usage de la marque « Manolo & Blahnik » par le déposant pirate.

C’est donc après plus de vingt ans de procédure, que, dans cette décision historique, la Cour populaire suprême (la plus haute juridiction en Chine) a annulé l’enregistrement de la marque « Manolo & Blahnik », déposée en 1999. Manolo Blahnik pourra désormais utiliser son nom en Chine et proposer ses créations à la clientèle locale.

Cette décision montre l’évolution du système judiciaire chinois et devrait inciter de nombreuses sociétés à faire valoir leurs droits contre ces marques pirate.

Toutefois, si la loi chinoise en matière de marques a évolué au cours des 20 dernières années, notamment pour renforcer la confiance des investisseurs dans le système juridique commercial de la Chine, il n’en demeure pas moins que les procédures restent longues et très couteuses. Il est donc nécessaire d’anticiper son dépôt en Chine en vue de son exploitation dans un futur proche, afin de ne laisser aucune place aux déposants malveillants.

 

Anaïs GREFFOZ, juriste en propriété intellectuelle chez Mark & Law