Il est des marques qui ont disparues de nos vies depuis longtemps, mais qui avaient atteint un tel niveau de notoriété qu’elles restent encore aujourd’hui dans l’imaginaire collectif ou du moins dans les souvenirs des générations qui les ont connues.
Certains d’entre vous se souviendront ainsi des hypermarchés Mammouth®, qui à l’époque savaient encore écraser les prix, du Banga® détrôné et racheté par son concurrent Oasis® ou des Raider®, les deux doigts coupe faim, ancêtres des Twix®.
Si ces marques ont quitté nos rayons et ont disparu de nos villes, elles ont en revanche imprégné nos cerveaux de consommateurs, suscitant aujourd’hui la convoitise de certains, qui se verraient bien relancer l’exploitation de ces dernières et ainsi bénéficier de leur histoire, de leur réputation et bien entendu de leur capacité d’attraction toujours bien réelle.
C’est ainsi que les chocolats Merveilles du monde® ont récemment refait surface. Ces tablettes de chocolat, qui ont marqué les enfants des années 80 et 90 par leur goût unique, leurs grands carreaux siglés de têtes d’animaux sauvages et contenant une carte vous racontant la vie des baleines boréales ou des zèbres de montagne, ont retrouvé en 2023 les rayons des grandes surfaces et ont même rejoint le comptoir des voitures-bar des TGV.
Dans cette nouvelle mouvance, la société PIASTEN a déposé en 2017 la marque Treets® pour désigner ses cacahuètes enrobées de chocolat et de sucre vendues en sachets. La marque Treets®, à l’instar des Raider®, était le nom sous lequel étaient connus les M&Ms® jusqu’en 1986, date à laquelle le virage pour la célèbre marque a été pris.
Risquant la déchéance de ses marques, toujours maintenues en vigueur mais non exploitées, la société MARS décide alors d’y renoncer et laisse donc la société PIASTEN déposer la marque Treets®.
Or, les Treets® étant encore connus d’une grande partie de la population française, les journaux se sont empressés d’annoncer le retour de cette marque disparue depuis des décennies.
MARS craignant qu’une confusion s’installe dans l’esprit des consommateurs s’est ravisée et a alors assigné la société PIASTEN devant le Tribunal judiciaire de Paris en invoquant :
Malheureusement pour elle, la société MARS a été déboutée par le tribunal qui estime, d’une part, qu’il n’y avait pas fraude, MARS ayant été informée des intentions de la société PIASTEN, laquelle lui avait même proposé des aménagements dans l’exploitation des produits, et, d’autre part, que « la renommée résiduelle éventuelle de la marque première est insuffisante à établir le caractère déceptif allégué » (TJ Paris 20 décembre 2023, RG n°18/14422).
Cette décision nous rappelle que, même si la renommée d’une marque a traversé les époques, alors même que les produits concernés ne sont plus en vente depuis des années, voire des décennies, son titulaire ne peut pas se prévaloir de cette renommée résiduelle pour tenter de la défendre ou de chercher à la maintenir en vigueur.
Rien ne vaut un usage réel et sérieux de la marque.
En revanche, l’entrepreneur qui voudra acquérir, auprès du titulaire d’origine, la marque ancienne pour en relancer l’exploitation en tirera des bénéfices non négligeables, dans la mesure où il pourra parfois récupérer des enregistrements de marques très anciens et surtout dans la mesure où il prendra un avantage concurrentiel certain grâce à la renommée résiduelle de la marque, qui attira facilement les personnes qui ne l’ont jamais oubliée et qui parfois attendaient son retour.
Avis aux intéressés, il ne vous reste plus qu’à fouiller le registre des marques pour essayer de trouver la pépite !
– Philippe BOHLAND, Conseil en Propriété Industrielle et Associé chez Mark & Law