La poésie des codes pays

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Comment, pour les sociétés, innover en termes de noms de sites internet, et pour les pays, rentabiliser leur extension.

Les extensions des noms de domaine internet ne sont pas de simples suffixes techniques : elles constituent un levier stratégique pour les entreprises et une source de revenus inattendue pour certains pays.

Voici comment ces extensions, souvent poétiquement liées aux codes pays, façonnent le web d’aujourd’hui.

Le nom d’un site internet, c’est un nom mémorisable (plus que les chiffres composant son adresse IP) et une extension, par exemple : marklaw.eu, wikipedia.org, oui.sncf… Les extensions se divisent en plusieurs catégories :

  • Les extensions génériques : .com, .net, .org, .info, .biz, .jobs, .tattoo, .bio, .london, .bzh…
  • Les extensions pays (ou ccTLD, pour country code top-level domain) : .fr (France), .cn (Chine), .co.uk (Royaume-Uni), .eu (Union européenne), basées sur les codes ISO des pays.
  • Les extensions marques, réservées aux titulaires de marques : .audi, .sncf…
  • Les extensions Web3, basées sur la blockchain, comme le .eth.

Certaines extensions pays sont devenues quasiment génériques, car elles ont été marketées pour leur intérêt commercial et créatif. Par exemple : love.me (me pour le Monténégro), stud.io (io pour l’Océan Indien) :

.TV, l’Eldorado de Tuvalu

Prisée par les chaînes de télévision, des plateformes de streaming et des web TV, l’extension .tv a été attribuée en 1995 au Tuvalu, un archipel du Pacifique situé à l’ouest de l’Australie. Le pays a revendu la commercialisation du .tv en 2001 pour 50 millions de dollars (renégociés à la hausse depuis), répartis sur 12 ans. Le PIB du Tuvalu en 2019 était de 52 millions de dollars. Les bénéfices issus de cette commercialisation externe aident à financer les services médicaux, scolaires et autres infrastructures vitales pour ce petit archipel.

→ En 2024, on compte environ 500 000 noms de domaine en .tv.

.AI, l’arbitrage intelligent d’Anguilla

Depuis 2023, l’extension .ai est très recherchée par les startups et les géants de la tech souhaitant valoriser leurs produits ou services liés à l’intelligence artificielle. Attribuée dès 1988 à Anguilla, territoire britannique situé entre Porto Rico et la Guadeloupe, l’extension .ai rapporte 140 $ par nom de domaine réservé, générant 30 millions de dollars en 2023. À titre de comparaison, le PIB de l’île était de 416 millions de dollars cette même année. Référencée comme un générique par Google, l’extension .ai s’adresse aux publics intéressés par les applications de l’intelligence artificielle.

→ En 2024, on compte 520 000 noms de domaine en .ai.

.IO : l’Océan Indien à l’ère technologique

L’extension .io est devenue très prisée dans les domaines informatiques et électroniques. Elle fait référence au concept I/O (Input/Output) – la communication des systèmes informatiques – et offre des noms de site originaux tels que stud.io, rad.io, portfol.io. Elle séduit aussi les jeux mobiles (ex. snake.io) et l’Internet des objets (IoT).

Attribuée en 1997 au territoire britannique de l’Océan Indien, situé au sud des Maldives, l’extension .io comptait 1 059 000 noms en 2024, se classant au 43ᵉ rang mondial. Jusqu’ici, ce territoire ne percevait rien sur la commercialisation de cette extension par les registrars privés. Le Royaume-Uni a rétrocédé en 2024 ce territoire à l’Île Maurice, qui pourrait modifier les conditions d’accès au .io ou même le supprimer, laissant 4 à 5 ans aux titulaires de noms de domaine pour trouver une autre extension. Néanmoins, l’Île Maurice verra sans doute l’intérêt financier à la conserver. Peu connue en dehors des technophiles, l’extension .io séduit par la disponibilité de ses domaines et l’image d’innovation et de technologie avancée qu’elle renvoie. Elle est également référencée comme un générique par Google.

.ME : le Monténégro assure en marketing

L’extension .me est idéale pour déposer des noms à caractère personnel, comme love.me. Lancée en 2008 par le Monténégro avec un marketing intensif, elle a connu un succès rapide et important. Les noms génériques premiums y sont vendus aux enchères : date.me s’est par exemple vendu pour 70 000 dollars.

→ En 2024, l’extension comptait 1 020 000 noms, la plaçant au 44ᵉ rang mondial.

.CO : la Colombie a tout COmpris

Avec 3 297 000 noms en 2024, l’extension .co se classe au 20ᵉ rang mondial. Elle joue sur plusieurs significations possibles : COmpany, COrporation, COmmerce, COmmunities ou COntent. Certains cybersquatteurs l’utilisent malheureusement pour leurrer les habitués du .com.

Rappelons que l’extension-star historique, le .com, concerne 157 600 000 noms en 2024 et reste la première extension au niveau mondial avec 43,5 % du total des noms de domaine.

Ces extensions, au-delà de leur rôle technique, racontent l’histoire des pays, des territoires et des aspirations numériques du monde. Une poésie inattendue, au cœur même des adresses web.